G2 obligatoire, qu’est-ce ça change ?
Alain Sabathié
Depuis le début de l’année, le programme G2 est obligatoire, ce qui veut dire que tous les animateurs en activité sont tenus de l’appliquer. Qu’est-ce que ça va changer dans le déroulement des stages ? Regardons comment ça se passe, entre animateurs G2 motivés et convaincus…
La G2 comprend 4 phases : prise de contact, diagnostic, influences, ajustement. Notons que la première phase existait déjà en G1, seules les trois autres étant spécifiquement G2 (encore que, pour être précis, deux séquences G1 y ont été incorporées : l’analyse de l’infraction et, au choix, un cas d’accident ou un questionnaire de cinématique).
Chaque phase se subdivise en trois séquences, sauf pour la prise de contact où il y en a quatre : la présentation, les données de sécurité routière, l’accidentologie et la psychophysiologie. Un programme ambitieux qui va exiger du temps pour sa mise en œuvre.
La prise de contact, c’est forcément par là qu’on commence, c’est logiquement la phase la plus longue puisqu’elle inclut ce qu’on appelle improprement le ‘‘tour de table’’, autrement dit la présentation des participants.
En mode bizounours, cette séquence devrait être terminée à 10h30. Dans la vraie vie, elle se termine en fin de matinée, à cause des formalités administratives qui, par défaut, incombent aux animateurs, et à cause du nombre de stagiaires (une vingtaine le plus souvent) qui doivent se sentir écoutés et donc disposer d’un temps de parole difficilement compressible.
Passons sur les deux séquences suivantes (données de sécurité routière et accidentologie) qui vont manger une bonne partie de l’après-midi et sur lesquelles il y aurait beaucoup à dire (ce sera pour une autre fois).
Nous voici arrivés à la séquence consacrée aux données psychophysiologiques, et c’est là que ça se complique question timing, car on approche de la fin de journée. Cette séquence éminemment technique devrait logiquement être confiée à un professionnel de l’enseignement de la conduite, mais beaucoup de psychologues s’en sont emparés et traitent le sujet à leur manière, sans trop se soucier du temps qui passe.
Le déroulement standard de cette séquence va de l’exercice des ‘‘trois phrases’’ (à ne pas confondre avec les ‘‘trois mots’’ !) à l’incontournable vidéo du gorille (le marqueur des stages permis à points), en passant par toutes les variantes possibles, et parfois cumulées : la jeunela vieille, le vase, les trois canards, le bonneteau, le meurtre anglais, etc.
Ici, toujours pas de changement par rapport à la G1, mais comme le succès est au rendezvous (les «Ah ! Mince !» les «Ça alors !» fusent au milieu des gloussements de satisfaction), ça augure mal de la suite : les cocus du système en redemandent, l’animateur passe pour un génie, il jouit, il en rajoute, il oublie la pendule…
Très souvent, quand la première journée est finie, il implore le collègue pour disposer d’un temps supplémentaire afin d’épuiser le sujet, la sécurité routière en dépend. Résultat : de précieuses minutes à prélever sur la seconde journée, bien évidemment. Accordé !
C’est comme ça qu’on peut parvenir à la pause de la seconde matinée en respectant parfaitement le programme imposé, mais sans la moindre trace de séquence G2 ! L’important, c’est de sensibiliser, pas vrai Coco ?
Théoriquement, à ce moment-là, on en a presque fini avec la G1 (je dis presque parce que la suite peut inclure deux séquences G1 : la grille d’analyse de l’infraction et, au choix, un cas d’accident ou un questionnaire de cinématique).
La deuxième phase du programme G2 (phase diagnostic) peut enfin commencer, mais on est déjà en fin de matinée de la seconde journée (vous suivez ?). Prévue pour durer une heure pile, il est rare qu’on s’en tire à si bon compte (3 mots pour 20 stagiaires, ça fait 180 propositions qu’il faut examiner, dénombrer, classer…), alors que l’alternative Photolangage® (notez l’absence d’article, la majuscule et le symbole d’une marque déposée…) est comptée pour une heure et demie.
Pour être honnête, il arrive que la phase diagnostic soit lancée en début de matinée, c’est même le moment idéal pour marquer la rupture avec le programme de la veille et ça permet de dégager du temps pour la suite. Mais il arrive aussi que cette phase soit lancée en début d’après-midi… Le record : les 3 mots un samedi à 14h40 ! (et par une psy 100% G2, AOC garantie made in Nevers !). Je vous laisse imaginer la suite. Après pareille expérience, on est fondé à croire que certains psys ont confondu les trois mots avec la G2, autrement dit le diagnostic avec le traitement de la maladie.
Reste à meubler le peu de temps qui reste. Facile, sans besoin de jouer la montre. La suite normale du programme, c’est une phase d’analyse des influences, trop souvent sabotée. Les plus naïfs se raccrochent à l’abaque de Régnier, quitte à galérer pour lever l’ambiguïté malgré le brouhaha. Les plus avisés proposent un texte neutre : le fou, l’amant et le passeur, c’est moins casse-gueule, mais il faut pouvoir l’exploiter. Les plus malins se contentent de vidéos en mode passif ‘‘ciné-club’’ (l’ascenseur, la salle d’attente…), c’est moins fatigant et ça permet de renouer avec le succès de la veille (le gorille…).
À ce stade, il ne manque plus que la phase d’ajustement pour finir le programme, s’il reste un peu de temps… Le dessin avec la boucle de Prochaska (normal après tout, c’est de là que tout est parti…), quelques lapalissades sur le changement, et le tour est joué !
Que faire quand on dispose de plus de temps, par exemple si la phase diagnostic a été lancée en début de journée ? Incroyable mais vrai, on a droit à un flash-back vers la G1 avec la grille d’analyse de l’infraction (1h30) et, si nécessaire, un cas d’accident (2h) ou le fameux questionnaire de cinématique pour les nuls (1h) ! Puisque c’est au programme !
Vous le voyez, ce n’est pas si compliqué la G2 ! Et ça ne va pas changer grand-chose à vos habitudes. La frontière entre les deux générations de stages étant loin d’être aussi étanche que prévu, les animateurs vont pouvoir continuer comme avant.
Ce fameux programme G2 qui se voulait révolutionnaire se résume donc, pour les plus motivés, à 3 séquences sur les 9 imposées, et parfois moins. Alors à quoi sert le reste ? Il fallait bien que Laurence Weber justifie son salaire, il fallait cautionner la présence des psys, il fallait donner du grain à moudre à une réactualisation très coûteuse, il fallait assez de matière pour éradiquer définitivement la G1…
Bien sûr, dans les faits, il n’en est rien, mais les apparences sont sauves, c’est bien l’essentiel n’est-ce pas ?
Bonsoir Alain,
Il en reste aujourd’hui que, jusqu’à preuve du contraire, aucune étude (neutre bien évidemment) ne valide l’approche G2.
Dans l’étude sur les « réitérants des stages » http://inserr.fr/sites/default/files/public/media/sante_conduite/rapport-final_reiterants-stages-dec2014_convention-inserr_dscr-2200657614.pdf , sauf erreur de ma part, il n’y a rien qui démontre que la G2 générerait moins de « réitérants » que la G1. Bon, il faudrait prendre un peu de temps pour vérifier…
J’ai même vu des animateurs qui prétendent être à fond G2 et font finalement toujours la même chose… Un copié/collé ! J’avais cru comprendre qu’il fallait adapter les outils en fonction du public et des parcours choisis ?
Enfin des psychologues qui répondent à une question réglementaire posée par un participant à « l’expert »; j’avais cru comprendre que les deux larrons avaient une approche différente et complémentaire ?!